Contexte
Le secteur de la construction est un grand consommateur de matières premières et produit beaucoup de déchets. L’implémentation de solutions circulaires est cruciale pour réduire son impact environnemental. Une solution consiste à donner une seconde vie aux éléments de construction en les réutilisant. Pour ce faire, il faut faire l’inventaire des éléments de construction présents et compter le nombre exact de ces éléments . Il s’agit toutefois d’un processus laborieux, surtout lorsqu’il est question d’un grand nombre d’éléments. Comment faciliter ce processus ? Est-ce possible de le faire à l’aide de moyens abordables financièrement ? Pour répondre à ces questions, Buildwise a mené deux cas d’étude en collaboration avec Rotor ASBL dans le cadre des projets DigitalDeconstruction et FCRBE, tous deux soutenus par Interreg Europe du Nord-Ouest.
Faits
Le premier cas d’étude a cherché à savoir si l’extérieur de bâtiments peut être rapidement transformé en modèle de construction numérique, et, dans l’affirmative, comment procéder à l’aide de dispositifs abordables et mobiles. Le second cas vise à déterminer si le modèle numérique obtenu peut ensuite être utilisé pour effectuer des comptages automatiques d’éléments à l’aide de l’intelligence artificielle (AI). Le but ultime étant de tester la possibilité de réaliser des comptages rapides et précis d’éléments ayant un potentiel de réemploi.
Compter les éléments à l’aide de l’IA
Dans le premier cas d’étude, nous avons vu que la photogrammétrie et les caméras à 360 degrés pouvaient être utilisées pour générer rapidement des modèles de construction numériques de qualité moyenne. Recourir à la photogrammétrie permet déjà, moyennant une mise à l’échelle correcte, de déterminer toutes sortes de distances, de surfaces et de volumes du modèle de construction numérique. Il est toutefois impossible de procéder à des inventaires plus poussés, comme le comptage des éléments individuels sur la seule base de la photogrammétrie. Nous avons par conséquent examiné, en collaboration avec Rotor ASBL, si l’IA pouvait être utilisée pour permettre ces comptages, en se penchant spécifiquement sur la possibilité de compter automatiquement les pavés présents en nombre à cet endroit, qui ont un grand potentiel de réemploi.
Tout d’abord, il s’est avéré que la technique de photo à 360 degrés n’est pas idéale à cette fin. Sans ajustement, le pied du trépied utilisé est visible sur les photos, bloquant ainsi partiellement la vue des pavés reconnaissables. Recourir à un trépied plus petit permettrait de réduire ce problème, mais présente l’inconvénient de se renverser facilement en cas de vent, ce qui serait problématique pour la caméra à 360 degrés qu’il supporte. Pour résoudre ce problème, le trépied a été supprimé du modèle numérique à l’aide de ce que l’on appelle le masquage :
Si l’objectif poursuivi n’est pas d’obtenir un modèle numérique complet du bâtiment, mais juste une photo des surfaces dont les éléments doivent être quantifiés, l’utilisation d’une caméra ordinaire est alors plus logique. Les photos d’exemple de pavés ont d’abord été étiquetées en vue du comptage automatique de l’IA. Il s’agit d’une technique dans laquelle l’emplacement de chaque pavé est indiqué manuellement sur des photographies, comme le montre cette vidéo :
Comme le montre la vidéo, l’étiquetage manuel de ces photos est terriblement chronophage. Il existe toutefois des moyens d’accélérer ce processus : pseudoétiquetage, p. ex. Il est ainsi possible d’étiqueter quelques photos, de laisser un réseau d’IA apprendre à partir de celles-ci pour qu’il puisse ensuite étiqueter automatiquement de nouvelles photos. Les étiquettes automatiques ainsi obtenues ne seront pas toujours correctes, mais la correction manuelle de ces erreurs sera toujours plus rapide que de tout étiqueter manuellement. Après avoir étiqueté les photos, l’étape suivante consiste à ‘entraîner’ le réseau. Le réseau apprend alors à reconnaître les objets souhaités (ici des pavés), à partir d’exemples. Dans le cas présent, un réseau neural léger a été utilisé, ce qui réduit la qualité de la reconnaissance, mais présente l’avantage de pouvoir être utilisé à une vitesse raisonnable sur des mini-PC financièrement abordables et même sur les meilleurs smartphones. La reconnaissance automatique d’objets avec l’IA ne nécessite pas nécessairement un PC de bureau rapide, ce qui rend la technique plus facile à utiliser.
Pour illustrer le résultat de la reconnaissance de l’IA, deux cadres rouges sont marqués sur le sol avec des pavés dans l’image ci-dessous. Les photos montrent comment les pavés des cadres sont automatiquement reconnus et peuvent être quantifiés sur cette base :
Si nous regardons de plus près, nous pouvons voir que le décompte dans le carré de droite n’est pas parfait à 100 %. Sans ajustement, le réseau ne reconnaît que les pavés qui sont visibles sur la photo. Ainsi, les pavés n’ont pas été reconnus dans le coin inférieur droit, car ils sont recouverts d’une végétation dense. Si vous voulez faire faire une estimation des pavés qui ne sont pas visibles sur les photos, on peut envisager de rédiger un script. Le réseau utilisé présente un avantage certain : selon la puissance de calcul disponible, il est capable de reconnaître et de quantifier les pavés très rapidement, même s’il existe des différences dans le schéma de pose. L’inconvénient, pour ainsi dire, est que sans ajustements supplémentaires, certains pavés peuvent rester non comptés en raison de la végétation ou d’autres types de couvertures.
Brève conclusion de ce cas d’étude
- L’utilisation d’une caméra ordinaire est plus logique en cas de comptages des surfaces au sol qu’une caméra à 360 degrés, car dans ce dernier cas, le trépied de la caméra doit être supprimé numériquement des photos.
- Le comptage automatique par l’IA d’éléments tels que les pavés s’est avéré possible dans le cas présent et, en raison d’une grande rapidité, peut faire gagner du temps et être potentiellement plus précis que le comptage manuel
- Certaines mesures peuvent être prises pour améliorer davantage la convivialité des comptages de l’IA : en mettant à disposition des réseaux d’IA qui peuvent compter les éléments communs et en augmentant la facilité d’utilisation en réglant les réseaux d’IA pour qu’ils puissent être utilisés sur des appareils mobiles abordables financièrement tels que les smartphones et les tablettes.
En détail :
Pour rendre possible le comptage des pavés, il a fallu tout d’abord retirer le trépied des photos à 360 degrés par masquage. Lorsqu’il s’agit de capturer exclusivement une surface au sol, nous concluons qu’il est plus évident d’utiliser une caméra ordinaire.
Grâce au réseau d’IA entraîné, les pavés clairement visibles sur les photos ont pu être comptés avec précision. Il existe deux options pour les pavés partiellement ou entièrement recouverts : effectuer un comptage manuel sur les parties où les pavés ne sont pas clairement visibles ou utiliser un script qui analyse les reconnaissances et, sur la base de certaines règles, le script fait encore une estimation du nombre de pavés qui n’ont pas été reconnus à l’étape précédente. L’avantage direct d’un comptage automatique des pavés était assez évident dans ce cas : la forme de la surface et les motifs de pose des pavés étaient irréguliers par endroits, ce qui rendait difficile une estimation manuelle précise du nombre de pavés. La reconnaissance du réseau d’IA est utile, car elle peut déterminer avec précision le nombre de pavés. Cette opération peut être réalisée indépendamment de la forme de la surface ou du motif de pose utilisé, avec les limitations mentionnées plus haut pour les pavés non ou partiellement visibles. La prochaine étape potentielle consiste à mettre à disposition des réseaux d’IA capables de compter les éléments communs. En outre, leur utilisation peut être facilitée en permettant le comptage automatique sur du matériel mobile et financièrement abordable, tel qu’un smartphone ou une tablette ordinaire.
Les projets suivants ont permis la réalisation de ce cas d’étude :